Côte d’Ivoire / CPI : Il ne faut plus transférer un ivoirien devant la justice Internationale

Article : Côte d’Ivoire / CPI : Il ne faut plus transférer un ivoirien devant la justice Internationale
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4 mars 2014

Côte d’Ivoire / CPI : Il ne faut plus transférer un ivoirien devant la justice Internationale

« Nous souhaitons que cette année 2013 soit… une année de transfert d’argent au pays, et non une année de transfert des gens au CPI. » Nous avons presque tous éclatés de rire, lorsque  cette phrase a été prononcée par le groupe baptisé les « Zinzins de l’art » au cours de l’émission humoristique « Bonjour 2013 ». Parce que tous les ivoiriens se sentent concernés par ce sujet, même s’ils n’ont pas la même appréhension des tenants et aboutissants. « Les relations entre la CPI et la Côte d’Ivoire », voilà un sujet sur lequel la quasi-totalité des Ivoiriens ont un avis. Si certains sont favorables à un renforcement de la collaboration entre les deux (02) entités, les autres y sont farouchement opposés. Et chacun y va de ses arguments. Personnellement j’ai un avis mitigé.

Retour sur les évènements entre la Côte d’Ivoire et la CPI

C’est le 17 juillet 1998 que l’acte fondateur de la Cour Pénale internationale (CPI), le statut de Rome fut signé par 120 États, dont la Côte d’Ivoire. Suite à cette signature, le statut de Rome devait être ratifié par les institutions des différents États signataires. C’est finalement le 15 février 2013, que la Côte d’Ivoire a déposé son instrument de ratification de ce statut au siège de l’ONU à New York. Devenant ainsi le 122ième  État partie de la Cour et le 33ième  État membre africain de cette juridiction. La ratification du Statut de Rome par la Côte d’Ivoire intervient près de 15 ans après que l’État ait initialement signé le traité.
Un certain nombre d’obstacles juridiques et constitutionnels ont retardé le processus.
La Cour constitutionnelle de la Côte d’Ivoire a statué initialement en octobre 2003 que la ratification du Statut de Rome n’était pas en conformité avec la Constitution ivoirienne de 2000.
Ceci implique que le traité ne peut être ratifié par la Côte d’Ivoire que si la Constitution en vigueur est modifiée pour corriger les incompatibilités.
Grâce aux efforts de plaidoyer des organisations de la société civile ainsi qu’au travail et au soutien des membres du Parlement, et compte tenu de l’évolution de la situation politique, la modification requise et un projet de loi approuvant la ratification par le gouvernement du Statut de Rome ont été approuvés par le Parlement le 20 décembre 2012 et par la suite signés et promulgués par le président Alassane Ouattara.

Mais bien avant la ratification du Statut de Rome, La Côte d’Ivoire  avait reconnu la compétence de la Cour Pénale Internationale pour les faits qualifiés de génocides, crimes de guerre et crimes contre l’humanité, depuis le 30 novembre 1998. Cette reconnaissance la été renouvelé le 18 avril 2003, le 14 décembre 2010 et le 3 mars 2011. C’est reconnaissance de la Cour Pénale Internationale (CPI) qui a permis à celle-ci de s’intéresser en 2011 aux crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis depuis le 28 novembre 2010 en Côte d’Ivoire.

Les poursuites de la CPI en Côte d’Ivoire

A ce jour, les poursuites de la CPI visent trois (03) personnalités ivoiriennes : l’ancien Président Laurent Gbagbo, son épouse Mme Simone Gbagbo, ainsi que Charles Blé Goudé. Tandis que les enquêtes, ont elles été élargies aux crimes commis depuis 2002.

Mémo de la CPI sur Laurent Gbagbo
Mémo de la CPI sur Laurent Gbagbo
Mémo de la CPI sur Simone Gbagbo
Mémo de la CPI sur Simone Gbagbo
Mémo de la CPI sur Blé Goudé
Mémo de la CPI sur Blé Goudé

Si Laurent Gbagbo a été remis à la CPI le 30 novembre 2011, Simone Gbagbo et Blé Goudé ne l’ont toujours pas été, quand bien même que la Cour et des ONG ne cessent de réclamer leurs extraditions.

Relations entre la Côte d’Ivoire et la CPI ; quelle suite ?

Quelle suite donner aux relations entre l’État Ivoirien et la CPI ? Notamment concernant les poursuites et enquêtes en cours ? C’est l’interrogation qui intéresse beaucoup d’observateurs et acteurs de la vie sociopolitique Ivoirienne. En effet, beaucoup soupçonnent le gouvernement de ne pas vouloir livrer à la CPI, les personnes qu’elle réclame. Personnellement j’estime que cette option selon laquelle la justice ivoirienne se donnerait les moyens pour organiser elle-même les procès est salutaire. Si hier notre justice était en lambeau, justifiant le transfert du président Laurent Gbagbo à la CPI, aujourd’hui elle retrouve ses marques. Si bien que des procédures judiciaires et des poursuites visent déjà Mme Simone Gbagbo et Charles Blé Goudé. Il ne faut donc livrer ni l’un ni l’autre à la CPI. Hier le transfert de Gbagbo était justifiable donc justifié, on ne peut pas en dire de même aujourd’hui pour la cas de Simone Gbagbo et Blé Goudé.

Au-delà de l’interrogation sur notre souveraineté judiciaire, l’organisation de ces procès en Côte d’Ivoire participera dans une certaine mesure à la dynamique de réconciliation nationale. En tout état de cause, un procès organisé en côte d’Ivoire n’a pas la même portée qu’un procès organisé à la Haye. Et un éventuel pardon prononcé devant et parmi le peuple ivoirien aura un impact décuplé par rapport à un pardon prononcé à des  milliers de kilomètres des victimes.

Les autorités ivoiriennes doivent donc résister aux pressions multiples pour organiser tous les procès en Côte d’Ivoire, dans la transparence et l’équité.

Tawakkal

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