Quand mère Afrique abandonne ses fils aux flots impitoyables
« Afrique mon Afrique !
Afrique des fiers guerriers dans les savanes ancestrales
Afrique que chante ma grand-mère
Au bord de son fleuve lointain
Je ne t’ai jamais connue… »
Loin de ses vers de David Diop, l’optimisme a perdu beaucoup de plumes. Plus de fiers guerriers, mais de misérables clandestins au milieu de nulle part, à la merci des flots de la Méditerranée. Ces filles et fils du continent qui sont désormais prêts à tout pour s’en aller loin de leur terre ancestrale. Témoins de ce spectacle de désolation, notre première réaction ne peut être que des pleurs, loin des chants de notre grand-mère. Des larmes de crocodile pour beaucoup.
Les années se suivent et se ressemblent. C’est par dizaines de milliers que nos frères embarquent vers les côtes européennes, dans des conditions de plus en plus dangereuses. Résultat; c’est par milliers qu’ils périssent chaque année en haute mer. Face à ce drame humain, si les dirigeants occidentaux ont une part de responsabilité, je reste convaincu que la grande responsabilité incombe aux Africains, à nous-mêmes. Un proverbe de chez nous dit en substance : « N’accusez pas à tort le lieu où vous êtes tombés, mais accusez plutôt celui où votre pied a buté ». La logique de cette sagesse voudrait que l’on pointe davantage l’Afrique qui pousse ses enfants dans le gouffre, et non l’Europe qui n’a rien demandé. Tandis que l’Union européenne se réunit en sommet extraordinaire, c’est silence radio du côté de l’Union africaine. Dans leur grande majorité, nos dirigeants restent silencieux face à ces drames. Et les rares commentaires que nous enregistrons ne sont d’ailleurs que des fuites en avant. En effet, ces derniers proposent d’empêcher les départs des côtes africaines. Pour faire baisser notre fièvre, ils ne trouvent pas mieux que de casser le thermomètre. Les irresponsables veulent nous condamner à mort. L’Afrique deviendrait ainsi une prison géante pour ses propres enfants.
Notre continent traverse une crise aigüe de leadership. Des dirigeants en manque de vision, n’ayant aucune solution aux problèmes existentiels de leurs populations. Ils disent ne pas être écoutés par leurs partenaires occidentaux, mais c’est le devoir du leader de se faire entendre. Tous parlent d’émergence, mais ne convainquent pas grand monde avec leurs chiffres macroéconomiques. Diantre, si vous n’êtes pas capables de redistribuer la grande richesse de ce continent, comment voulez-vous que vos populations y croient. Les fruits du leadership moribond ne sont que désespoir, désolation, et drame. Le mal étant connu, nous devons nous atteler à le traiter. J’aimerais donc m’adresser pour finir à mes frères et sœurs qui veulent s’en aller : nous pourrions transformer nos pays respectifs en ce paradis qui vous attire en pleine Méditerranée.
Tawakkal
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