Côte d’Ivoire : 20 ans d’hommage à Felix Houphouët BOIGNY, quel bilan ?

Article : Côte d’Ivoire : 20 ans d’hommage à Felix Houphouët BOIGNY, quel bilan ?
Crédit:
10 décembre 2013

Côte d’Ivoire : 20 ans d’hommage à Felix Houphouët BOIGNY, quel bilan ?

7 Décembre 1993- 7 Décembre 2013, voilà 20 ans jour pour jour que le père fondateur de la nation Ivoirienne tirait sa révérence, après trente et trois (33) ans de règne. Depuis lors cet illustre disparu a fait l’unanimité des hommages, chacun revendiquant son héritage et s’affichant comme l’épigone de son œuvre. Mais que pouvons-nous retenir de tout cela ?
Ce 7 décembre 1993, donc, un homme, « un grand homme qui avait traversé presque le siècle, un homme ordinaire qui a fait des choses extraordinaires », selon l’Ambassadeur Jean Vincent Zinsou, s’en est allé, laissant une nation, fortement secouée par sa disparition, livrée à elle-même du moins aux « appétits » voraces du pouvoir de ses « fidèles » lieutenants qui se réclament tous de lui, sans avoir son génie encore moins son charisme ou son don de soi. (1)

Après un deuil national de deux mois (du 7 décembre 1993 au 7 février 1994), le 7 février 1994, 27 chefs d’état africains et européens, des représentants de cent vingt autres pays, des hautes autorités de la planète se joignent aux Ivoiriens, toujours affligés, pour rendre un « ultime » hommage au « Vieux » à la Fondation pour la recherche de la paix qui porte son nom à Yamoussoukro avant l’inhumation dans «l’intimité » au cœur de la résidence privée qui deviendra, un lieu de pèlerinage. Fini les cérémonies funéraires, la Côte d’Ivoire doit apprendre à vivre sans le « Vieux », une épisode qui se révéla périlleuse. La guerre de succession que se sont livrée ses héritiers a contribué à balafrer la Côte d’Ivoire qu’il a bâtie avec des valeurs comme, la fraternité, l’unité, l’amour, le pardon, la paix et le dialogue qu’il a érigé en seconde religion. Des entrailles du parti politique (le Pdci-Rda) qu’il a fondé, est sortie une multitude de partis dont les principaux restent le Rdr, l’Udpci, et l’Udcy. La Côte d’Ivoire, même, est rentrée dans un cycle de violence jamais connue. Un coup d’Etat (1999), une rébellion (2002-2010) et une meurtrière crise postélectorale (2011) ayant occasionné 3000 morts et des centaines de milliers d’exilés ont dû faire retourner le « Bélier » de Yamoussoukro dans sa tombe. (2)

Une tombe sur laquelle se sont recueillis le samedi dernier (07/12/2013) des milliers d’Ivoiriens et amis de la Côte d’Ivoire dans le cadre des cérémonies commémorant le 20ème anniversaire du décès du « Père fondateur ». en tête de cette commémoration Alassane OUATTARA , Président de la république de Côte d’Ivoire, celui qui il y a 20 ans était Premier Ministre. Les acteurs politiques, les artistes, les citoyens Ivoiriens ont participé à cet évènement. Cette ainsi que les communicateurs Houphouetistes ont organisé une exposition photo pour retracer la vie et le combat de Félix Houphouët BOIGNY.

https://www.youtube.com/watch?v=MwndHnPKh2g
Au nombre des contributions à cette commémoration nous avons également celle de l’ancien Premier Ministre Charles Konan BANNY sur le site d’information Jeune Afrique.
Pour ma part je trouve salutaire l’œuvre du « Père Fondateur », quoique j’estime qu’il aurait pu mieux gérer sa succession. Car toutes les crises qu’a connu la Côte d’Ivoire tire leurs sources de la guerre de succession qui a suivi la disparition du « Vieux ». Une succession apaisée aurait parachevé son œuvre louable à la tête de la nation Ivoirienne, encore fallait-il que celle-ci se fasse de son vivant. Cela dit, les successeurs de Félix Houphouët BOIGNY doivent s’inspirer de son riche héritage pour sceller l’union autour de la Côte d’Ivoire. Les Ivoiriens dans toute leur diversité doivent se convertir à la religion du dialogue fondée par « Nanan », afin que nos différences loin de nous diviser nous enrichissent.
Pour finir, à l’occasion de ces 20 ans du décès d’Houphouet BOIGNY, une messe commémorative a été présidée à la Basilique notre dame de la paix par l’évêque de Yamoussoukro. Au cours de son homélie, Monseigneur Marcellin KOUADIO a livré un remarquable message de circonstance, en présence du président Alassane Ouattara, du président Henri Konan Bédié, des présidents des institutions nationales, de nombreux membres du gouvernement et de très nombreux membres de famille et proches du défunt président. Retrouvez ci-dessous quelques extraits :
« Permettez qu’à partir d’une méditation inculturée, je m’adresse à lui (Houphouët) au nom des sans-voix. Car en Afrique, les morts ne sont pas morts. En outre, les familles de la terre communiquent avec celles de l’au-delà, d’où la vénération des ancêtres. Et cette foi des Africains ne contredit pas la foi chrétienne qui intègre la communion des saints, la résurrection de la chair et la vie éternelle », a-t-il ainsi planté le décor, avant de poursuivre : « (…) Oui Nanan (appellation de chef en langue locale, ndlr), tu nous l’avais dit et je cite : « le vrai bonheur, on ne l’apprécie que lorsqu’on l’a perdu (…) » Oui, depuis le 7 décembre 1993, jour où tu nous as quittés, ton peuple a perdu le vrai bonheur. Et depuis lors, la Côte d’Ivoire, notre chère patrie, s’est asservie aux mensonges, à la violence et aux crimes ».
L’homme de Dieu fera savoir que la belle Côte d’Ivoire, jadis enviée parce que prospère, est aujourd’hui défigurée et meurtrie par de multiples crises militaro-politiques dont les raisons profondes restent encore à élucider. « La dernière en date a fait officiellement, semble-t-il, 3000 morts. La rébellion de 2002 a fait une foule innombrable de victimes. Curieusement, Nanan, ceux qui mentent et tuent croient servir ainsi la Côte d’Ivoire. Les innocents dont les droits sont bafoués sont déclarés coupables, d’où le nouveau concept de la culpabilité collective doublé de la culture de l’impunité où les médiocres sont célébrés. Certains de nos jeunes revendiquent fièrement le statut d’ex-combattants afin d’être récompensés. Et dans cette situation trouble, les ressources de notre pays sont livrées en pâture aux prédateurs. Notre mère patrie, humiliée et meurtrie, est traitée comme une fille de joie. Oui, la Côte d’Ivoire est traitée, contre sa volonté, comme une péripatéticienne. Le temps, pour ainsi dire, vient de te donner raison : « la paix, ce n’est pas un vain mot, mais un comportement » (…) Malheureusement, bon nombre de tes enfants qui prennent ton nom mais n’ont pas ton esprit, préfèrent la guerre à la paix, la mort à la vie, le mensonge à la vérité, l’aumône au travail, etc. Nanan, aujourd’hui, jouissant de ta double nationalité de citoyen du monde d’ici-bas et de l’au-delà, aide nous a renouer avec la paix. De là où tu es, prie pour nous », a-t-il conclu son compte rendu à Houphouët-Boigny, avant d’appeler les Ivoiriens à prier pour la paix. « Chers frères et sœurs, hommes et femmes de bonne volonté, demandons au seigneur Jésus, le Roi des rois, d’accorder à notre pays la grâce de la paix par la réconciliation vraie, qu’il touche le cœur des bourreaux et prenne en pitié les victimes de ces multiples crimes (…) Les Ivoiriens parlent de paix et de réconciliation, mais combien sont-ils qui désirent vraiment la paix ? », s’est-il interrogé. (3)

Il donnera par la suite sa recette pour une réconciliation vraie entre les Ivoiriens : « Pour que la Côte d’Ivoire renoue avec la paix, je verrais humblement, pour ma part, les présidents Ouattara et Gbagbo faire la paix au sommet, et une fois réconciliés, qu’ils demandent pardon à leurs militants et aux Ivoiriens qui, à leur tour feront la paix. En Dieu, cela est encore possible pour le bonheur de tous ». Bien qu’ayant visiblement gêné les nombreuses autorités du pays présentes, ce prêche qui a jeté dans l’église un lourd silence, a été longuement applaudi par l’assistance.(4)

Ma foi le meilleur hommage que nous puissions rendre à Félix Houphouet BOIGNY est nous approprier les valeurs qu’il a incarné avec tant de fidélité. Que chaque fille et fils de la terre d’Eburnie se convertisse à la réligion de dialogue du « Père Fondateur ».

Vive la Côte d’Ivoire, « Nanan » repose en Paix!!!

Tawakkal

Notes: 

(1) & (2) : Extrait de Alassane Ouattara « ressuscite » Houphouët-Boigny, 20 ans après sa mort

(3) et (4) : Extrait de Commémoration des 20 ans du décès d’Houphouët-Boigny : L’évêque de Yamoussoukro dit ses vérités aux hommes politiques

Partagez

Commentaires